mardi 25 avril 2017

Les lésions médullaires traumatiques et médicales (paraplégies et tétraplégies) :

Les lésions médullaires traumatiques et médicales (paraplégies et tétraplégies)

La paraplégie est une paralysie des deux membres inférieurs résultant (sauf exception) d'une atteinte de la moelle épinière, traumatique (accidentelle) le plus souvent, mais parfois médicale (maladie). On englobe parfois sous ce terme aussi bien les paraplégies au sens strict (lésions dorsales, lombaires et sacrées), que les tétraplégies (lésions cervicales). La plupart des personnes atteintes de para ou tétraplégie se déplacent en fauteuil roulant mais ce désavantage, bien visible, s'accompagne de déficiences associées qui, si elles sont souvent cachées, sont très gênantes voire sources de complications.

Qu'est-ce que la paraplégie et la tétraplégie?

La paraplégie résulte d'une atteinte de la moelle épinière et des racines ou encore d'une atteinte importante des racines de la queue de cheval (figure 1 et 2) : au sens strict, paraplégie signifie paralysie des membres inférieurs, en pratique elle est presque toujours d'origine médullaire. On parle de tétraplégie en cas de lésion cervicale : tétra : quatre (membres) : les tétraplégies représentent environ un tiers des atteintes médullaires.
Les accidents, dont on estime le nombre de cas annuels entre 1000 et 1500, en sont la première cause : ce sont donc le plus souvent des sujets jeunes (15-35 ans) qui en sont atteints, plus souvent des hommes que des femmes. Au total, les estimations du nombre de personnes atteintes de para- ou tétraplégie en France sont de 25 000 à 30 000 (mais ce nombre comprend non seulement les lésions médullaires, traumatiques ou non, décrites dans cet article, mais aussi des pathologies assimilables comme le spina bifida).

Comment se manifeste-t-elle?

Les symptômes découlant de l'atteinte de la moelle épinière sont nombreux, liés à la physiologie de la moelle épinière. Ce sont :
  • des troubles moteurs;
  • des douleurs;
  • des troubles sensitifs;
  • des troubles génito-sexuels;
  • des troubles sphinctériens;
  • des troubles respiratoires;
  • vésicaux et intestinaux;
  • autres troubles associés.
  • des troubles neurovégétatifs;

Des troubles moteurs

Ils intéressent :
  • la motricité volontaire dont l'atteinte se traduit par une paralysie (atteinte complète : mouvements totalement impossibles) ou par une parésie (atteinte incomplète : mouvements possibles mais de faible puissance). La topographie de l'atteinte dépend du niveau de l'atteinte vertébro-médullaire (figure 2). L'intensité de la paralysie peut être homogène dans le territoire touché ou, au contraire, avoir plusieurs niveaux d'atteinte, par exemple entre le côté droit et le côté gauche ou entre la partie proximale (haut du corps, racine des membres) et la partie distale (extrémités), souvent plus touchée en cas d'atteinte incomplète (parésie) ;
  • la motricité réflexe (qui règle le tonus musculaire). Deux cas de figure se présentent habituellement :
    • soit une augmentation de la réflectivité musculaire par déconnexion entre la moelle épinière et les centres régulateurs centraux (cerveau). On note alors, la mobilisation des membres, une raideur qui s'oppose à l'étirement des muscles et qui s'accroît avec la vitesse de celui-ci. Cette raideur ou hypertonie, que l'on nomme aussi spasticité, entraîne des mouvements anormaux automatiques appelés contractures (parfois pris pour des mouvements involontaires);
    • soit une disparition de la tonicité définissant alors l'état de flaccidité ou d'hypotonie. On parle de paraplégie flasque. Cet état résulte soit d'une destruction médullaire complète soit d'une atteinte isolée ou associée des racines nerveuses. Il peut être transitoire (début) ou persister définitivement. En ce cas l'amyotrophie (fonte musculaire) est importante, le risque d'escarre et de phlébite accru.

Niveaux vertébraux (chiffres romains) et médullaires métamériques (neurologiques)

Des troubles sensitifs

Ils intéressent :
  • la sensibilité superficielle (figure 3 et 4) qui véhicule toutes les sensations cutanées : tact (sens du toucher) fin, douleur, chaud et froid, tact profond. Son absence définit l'anesthésie, sa diminution l'hypoesthésie. Tous les degrés d'atteinte peuvent exister chez un même patient, avec par exemple une sensibilité au tact conservée et une anesthésie complète à la douleur exposant donc la personne au risque de blessures ou de brûlures accidentelles passant parfois inaperçues. C'est en cas de perte totale de sensibilité que les risques d'escarres seront majeurs;
  • la sensibilité profonde qui nous renseigne en permanence avec précision sur la position exacte de notre corps et sur les pressions et les mouvements de cisaillement que subit la peau. Ceci explique que les blessés médullaires doivent regarder leurs jambes et leurs pieds pour savoir ou ils se trouvent et les tétraplégiques leurs mains pour pouvoir s'en servir ou les protéger. Ce trouble est aussi à l'origine des difficultés d'équilibre du tronc, associées à la paralysie des muscles abdominaux, ainsi que des sensations de « vertige »  et de peur du vide que rencontre bon nombre d'entre eux.

Les dermatomes (territoires cutanés innervés par une seule racine médullaire). D'après O. Foerster et M. Maury.

Figure 4
Zones-tests utilisées dans l'évaluation des troubles de la sensibilité cutanée et du niveau d'atteinte de la moelle. D'après O. Foeerster et M. Maury.

La partie postérieure de la moelle, ou cornes dorsales (ou postérieures), véhicule :
  • la sensibilité superficielle (tact, douleur, chaleur);
  • la sensibilité profonde (perception du corps dans l'espace, pressions, vibrations, équilibre...);
  • la sensibilité viscérale.
La partie antérieure de la moelle, ou cornes ventrale (ou antérieures), véhicule :
  • la motricité des muscles striés (dont la contraction est commandée volontairement);
  • la motricité végétative muscles lisses des viscères, des vaisseaux et des glandes.

  1. Fonction urinaire.
  2. Fonction intestinale

Des troubles sphinctériens, vésicaux et intestinaux

Les troubles vésico-urinaires résultent de l'atteinte de la motricité, de la sensibilité et des réflexes (figure 6). Après une phase initiale de rétention complète surviennent, si le traitement n'est pas mis rapidement en route, des fuites urinaires et fécales. Il s'agit de fuites par regorgement (trop plein) et la vidange, tant vésicale que rectale, n'est jamais complète. Il y a donc toujours nécessité d'aide pour évacuer le contenu vésical et rectal. Habituellement, on distingue deux types de dysfonctionnement sphinctérien suivant qu'on est en présence d'une atteinte spasmodique (présence de réflexes) ou flasque : respectivement fonctionnement automatique (hypertonique) ou autonome (hypotonique). La prise en charge thérapeutique diffère dans l'un ou l'autre cas.

Des troubles neurovégétatifs

Ils se manifestent en cas de lésion cervicale et dorsale haute (niveau  D6) :
  • hyper-reflectivité autonome (HRA) : élévations brusques et intenses de la tension artérielle, accompagnées de céphalées violentes, de sudation avec érythème (rougeur), de frissons et d'horripilation (érection des poils). Les circonstances de déclenchement de l'HRA sont multiples : les plus fréquentes sont d'origine urinaire (globe vésical, sondage, infection urinaire) mais aussi cutanée, rectale (fissure anale, hémorroïdes), viscérale...
  • hyper ou hypothermie : variations de la température du corps, dues à l'absence de régulation de vasomotricité et de sudation dans le territoire sous lésionnel (partie du corps sous la lésion).

Des douleurs

On distingue deux grands types de douleurs :
  • les douleurs par hyper stimulation : douleurs sus-lésionnelles (territoire au dessus de la lésion), où la sensibilité est a priori normale, d'origine musculaire, articulaire ou osseuse;
    • douleur lésionnelles (au niveau de la lésion médullaire), par radiculalgies (atteinte des racines) secondaires à la lésion vertébrale, parfois par algodystrophie réflexe;
    • douleurs sous-lésionnelles (partie du corps sous la lésion), de type viscéral, vasculaire ou musculaire.
  • les douleurs par levée d'inhibition :
    • douleurs lésionnelles. Elles siègent soit au niveau d'un territoire hyper-esthésique, (avec renforcement par le moindre contact externe), soit anesthésique, (souvent à type de brûlure);
    • douleurs au niveau sous-lésionnel : souvent polymorphes, associant des douleurs de type cordonal postérieur (atteinte des cordons postérieurs de la moelle, sensations de broiement, de décharges électriques ou d'éclairs) et des douleurs de type spino-thalamiques (atteintes des voies de la sensibilité superficielle - cf. Physiologie médullaire et figure 4) à type de brûlures extrêmement pénibles.

Des troubles génito-sexuels

  • Chez l'homme la fonction génito-sexuelle est profondément modifiée. L'érection réflexe, nécessaire pour avoir des rapports, est absente quand le syndrome lésionnel est complet au niveau des métamères sacrés (cf. figure 2) (l'érection psychogène est cependant possible). Dans les autres cas l'érection est souvent possible, en général à l'aide de stimulations et de manœuvres appropriées. L'éjaculation, nécessaire au recueil du sperme en vue de la procréation lorsqu'elle est souhaitée, n'est envisageable que si les métamères D11, D12, et L1 ne sont pas au niveau de la lésion médullaire. Dans les autres cas, des techniques appropriées peuvent être mises en œuvre. Bien souvent une consultation auprès d'un spécialiste de la paraplégie est nécessaire.
  • Chez la femme, les troubles de la sensibilité périnéale, s'ils sont complets empêchent la perception lors des rapports. L'orgasme reste possible à condition que les voies réflexes lombo-sacrées soient intactes. Après une période sans règles de 1 à 9 mois, habituelle en cas de lésion traumatique, la femme est à nouveau féconde et peut mener à bien une grossesse (une surveillance est nécessaire, spécialement pour traiter les infections urinaires, surveiller les reins, surtout en cas d'antécédents de pyélonéphrite : infection rénale). L'accouchement se fait par les voies naturelles et sous péridurale, notamment s'il existe un risque d'hyper-réflexie autonome ; les forceps sont appliqués en cas de paralysie des muscles abdominaux. Le choix de la contraception se fera après bilan général soigneux, du fait notamment du risque accru de phlébite et d'infections.
Une information du couple est souhaitable sur les possibilités génito-sexuelles du conjoint blessé car, on l'aura compris, tout est affaire ici de cas particulier.

Des troubles respiratoires

Ils résultent de l'atteinte des muscles respiratoires : abdominaux, intercostaux et, dans les atteintes les plus hautes (C4), du diaphragme (tableau). Ils imposent souvent au début une assistance respiratoire (intubation ou trachéotomie). Par la suite la kinésithérapie assurera la « toilette bronchique »  avec valorisation de l'expiration et de la toux. Cette technique préventive sera enseignée au sujet pour qu'il la pratique lui même régulièrement et en cas d'encombrement broncho-pulmonaire. Le déficit des muscles abdominaux sera efficacement compensé par le port d'une sangle abdominale, indispensable, au moins dans les premiers mois de verticalisation, en cas d'atteinte cervicale et dorsale haute (D6 et au dessus).
Atteinte respiratoire et niveau médullaire Niveau métamérique de l'atteinte médullaire Muscles respiratoires touchés
Tétraplégiques C3 à C5 Diaphragme
Paraplégiques D1 à D10 Intercostaux
D6 à D12 Abdominaux

Autres troubles

Les troubles circulatoires, en dehors des problèmes de la phase initiale, découlent de la désadaptation cardio-vasculaire à l'effort dont la cause principale est le déficit du retour veineux vers le cœur (la paralysie des muscles de la partie inférieure du corps, surtout si elle est flasque, entraîne une stase veineuse aggravée par la vasoplégie : les muscles entourant les petits vaisseaux sanguins n'interviennent plus pour réguler le débit). Le débit sanguin est diminué et ne peut s'accroître normalement en cas d'effort physique, d'où une grande fatigabilité, des hypotensions, des malaises, etc. La stase veineuse périphérique est cause d'œdèmes, eux-mêmes source de fragilité cutanée, de thrombophlébites : le port de bas de contention veineuse est indispensable.
L'immobilité forcée entraîne une décalcification osseuse, ou ostéoporose, et un risque de calculs urinaires. Une diurèse importante (boissons abondantes) est donc préconisée surtout dans les premiers mois.

Quelles en sont les causes ?

Les causes traumatiques (blessures par accident) sont de loin les plus fréquentes : entre 70 et 80 % des lésions médullaires totales. Elles entraînent des para/tétraplégies médullaires traumatiques (d'où le nom de blessés médullaires donné aux personnes atteintes de cette façon). On assimile parfois à tort les para ou tétraplégies à ces seuls cas de blessures médullaires par traumatisme accidentel alors que dans 25 % des cas, il s'agit de causes médicales.

Causes de paraplégies ou de tétraplégies

Causes traumatiques (blessés médullaires, ou para/tétraplégies traumatiques)

Les accidents de la route sont les plus fréquents, puis viennent les accidents de sport, les tentatives de suicide, les plaies par arme à feu ou par arme blanche.
Les accidents du travail peuvent être trouvés dans toutes les catégories citées (en dehors du suicide), mais certaines lésions sont plus fréquentes sur le lieu du travail. Citons: les chutes d'un lieu élevé, les lésions par explosion, les électrocutions, les accidents de décompression (plongée).

Causes médicales

Causes infectieuses ou parasitaires : abcès médullaire, mal de Pott (abcès tuberculeux), épidurite tuberculeuse, bilharziose (parasitose).
Causes vasculaires: ramollissement ischémique de la moelle épinière (infarctus médullaire ou myélomalacie), hématome extradural médullaire, malformation artérioveineuse médullaire (angiome...), anévrisme de l'aorte.
Causes tumorales: neurinomes, métastases vertébro-médullaires de différents cancers, neurofibromatoses, maladie de Hodgkin et myélome.
Autres causes: toxiques (injections intra-rachidiennes), arachnoidites (inflammation des enveloppes de la moelle), fractures « pathologiques » des maladies rhumatismales (fracture du rachis non due à un accident mais au fait que l'os est altéré: spondylarthrite ankylosante, kyste rhumatoïde)
Les exceptionnels « accidents chirurgicaux » responsables d'atteinte médullaire peuvent selon les cas être traumatiques (blessures) ou médicaux (lésions par privation d'oxygène de la moelle - anoxie - durant l'anesthésie).

Comment évoluent-elles?

Pronostic: Lésions traumatiques et lésions médicales aiguës ou subaiguës

On sait que, en matière de pronostic, tout se joue au moment du choc pour les lésions traumatiques et dans les heures qui suivent l'installation de la paraplégie pour les atteintes médicales (aiguë signifie : soudain). Les mécanismes de la lésion sont maintenant mieux connus. Sur le plan clinique, une lésion incomplète d'emblée a plus de chances de récupérer qu'une lésion complète. Par ailleurs la vitesse de récupération est un élément important. Généralement, le pronostic se dessine dans les premières semaines. En l'absence de récupération deux mois après le traumatisme les possibilités de récupération diminuent très vite avec le temps. Il n'est cependant pas possible de se prononcer de façon formelle et définitive avant une durée de 8 mois post-traumatique en ce qui concerne les lésions de la moelle proprement dite et avant 18 mois pour les atteintes des racines et des nerfs périphériques associées.

Lésions dues à des compressions lentes de la moelle (neurinomes, méningiomes, etc.)

Lorsque le diagnostic est posé et que la thérapeutique a été mise en œuvre, le pronostic dépend de la gravité de l'atteinte et du délai d'intervention. En cas d'atteinte complète avant le traitement, le pronostic sera sévère alors que plus la lésion est incomplète plus les chances de récupération sont importantes. Dans ces cas, les symptômes les plus longs à disparaître ou à s'atténuer sont les troubles de la sensibilité profonde et la spasticité.

Mécanisme des lésions médullaires - perspectives préventives (dans les lésions traumatiques, voire médicales aiguës/subaiguës)

Mécanismes on décrit trois processus:
  • des troubles circulatoires et hémodynamiques (pressions sanguines). Le débit sanguin spinal est très nettement diminué dans les 15 minutes qui suivent le traumatisme médullaire et ceci se poursuit pendant les premiers jours. Les lésions sont aggravées par les troubles de la tension artérielle;
  • une réaction inflammatoire. Il se produit un afflux de globules blancs au niveau de la lésion en 8 à 24 heures. Ces phénomènes inflammatoires sont à l'origine d'un œdème qui aggrave les lésions. Ils existent également au cours de la phase de cicatrisation médullaire:
  • des phénomènes biochimiques. Il existe de nombreuses interactions de phénomènes biochimiques complexes qu'on ne peut détailler ici. Ils aboutissent à l'autodestruction progressive du tissu nerveux

Recherche et perspectives

Les neurophysiologistes travaillent sur le problème de l'absence de régénération médullaire. Des travaux récents ont montré que, d'une part l'implantation d'un segment de nerf périphérique dans la moelle épinière entraîne la possibilité de régénération de neurones centraux à travers le nerf greffé et que, d'autre part, l'implantation de cortex neurologique ou de cellules embryonnaires dans une cavité expérimentale intramédullaire s'accompagne d'une régénération nerveuse et de connexions périphériques à travers un greffon nerveux. Les études expérimentales au niveau de la moelle épinière lésée permettent actuellement d'envisager des actions thérapeutiques dans plusieurs directions dont:
  • la prévention des lésions secondaires d'auto-aggravation par des moyens médicamenteux mis en œuvre très précocement. Il n'est pas impossible que dans les prochaines années on découvre un produit qui, injecté dans les premières heures, empêcherait ou au moins limiterait l'installation de la paraplégie;
  • la stimulation de la régénération neuronale par la diminution de la barrière cicatricielle, l'adjonction de facteurs de croissance et le contrôle de la synaptogénèse (création de nouvelles connexions) Là, il faudra sans doute attendre de longues années avant qu'on puisse obtenir des résultats tangibles.

Les complications

Au début, le risque de décès est présent dans les para/tétraplégies traumatiques pendant les toutes premières heures et la phase de réanimation, surtout en cas de polytraumatisme. Il est primordial de ne pas aggraver les lésions médullo-radiculaires (lors du ramassage du blessé puis des installations : examens complémentaires par exemple). L'immobilisation en matelas coquille est la règle pour tout déplacement tant que la fracture n'est pas réduite et fixée (par contention externe, ou ostéosynthèse). En même temps débute la prévention des escarres dans les territoires anesthésiés (matelas spéciaux, changement de position toutes les 2-3 heures), ce d'autant qu'il existe des troubles tensionnels et thermiques. En cas de tétraplégie, la lutte contre l'obstruction bronchique est souvent prioritaire (paralysie des muscles abdominaux et impossibilité pour le blessé de tousser). Par la suite, la survenue d'atélectasies pulmonaires (zone qui n'est plus ventilée) avec infection est fréquente. Leur prévention passe là encore par des changements fréquents de position et par des séances de respiration dirigée et de percussion thoracique.
Par la suite, les complications fréquentes sont : les infections de l'appareil urinaire (pyélonéphrites, cystites) et de l'appareil génito-uréthral (prostatites, uréthrites), les calculs rénaux et vésicaux; les thrombophlébites. Et plus rarement : les ostéomes (formations osseuses anormales) ou para-osteo-arthropathies (POA) au niveau des grosses articulations (risque d'ankylose), les fractures pathologiques survenant dans le territoire lésionnel pour un traumatisme souvent mineur, dues à la décalcification et de diagnostic parfois retardé du fait de l'anesthésie, les occlusions intestinales par défaut d'évacuation des selles.

Quels traitements et prise en charge peut-on proposer ?

Il n'y a pas encore de traitement spécifique de la lésion médullaire proprement dite.

Traitement initial

C'est celui de la cause de la lésion. La réduction et la fixation de la fracture ainsi que le bilan des lésions radiculo-médullaires en cas de traumatisme et la cure de la compression dans certaines atteintes médicales, sont le domaine du chirurgien.

Rééducation

Le médecin rééducateur et toute l'équipe du centre de rééducation poursuivent le traitement en mettant en œuvre les soins spécialisés. Le but du traitement est de permettre au blessé de retrouver au maximum son autonomie personnelle, en utilisant toutes les ressources que lui permettent les muscles situés dans le territoire sus-lésionnel et en apprenant à connaître et à contrôler autant que possible des fonctions situées dans les territoires lésionnel et sous-lésionnel.
  • La kinésithérapie entretient la mobilité articulaire dans les territoires atteints, lutte contre les rétractions qu'entraînent les contractures et développe la force des muscles non paralysés. La progression suit un ordre bien défini en fonction des possibilités du sujet: premiers levers, installation au fauteuil roulant, travail de l'équilibre assis, recherche de l'indépendance assise et maniement du fauteuil. Quand cela est possible: rééducation en position debout (appareillée le plus souvent) et apprentissage de la déambulation.
  • L'ergothérapie sert particulièrement chez le tétraplégique: apprentissage et perfectionnement des gestes quotidiens toilette, habillage et coll.imentation), l'étude des aides techniques et des adaptations nécessaires au domicile et pour les déplacements (fauteuil électrique, automobile adaptée...).
  • Le sport fait partie intégrante de la rééducation. Natation, basket, athlétisme, ping-pong, mais aussi tennis, tir à l'arc, canoë-kayac et ski (entre autres) sont praticables et recommandés, tant lors de la phase de rééducation active au centre de rééducation, qu'à titre d'entraînement par la suite.
  • La rééducation vésico-sphinctérienne doit rétablir un cycle continence-évacuation compatible avec la vie sociale et obtenir la vidange complète de la vessie à chaque évacuation. En cas de fonctionnement automatique ou réflexe, des déclenchements mictionnels sont tentés par percussions ou pulsions sus-pubiennes. En l'absence de réflexe, l'écoulement des urines est provoqué par appui sus-pubien. La vidange vésicale est assurée pendant la rééducation par des sondages, effectués par l'infirmière puis, si cela est nécessaire et possible, par le sujet lui-même. La technique de l'auto-sondage est couramment employée, elle est sans danger si elle est pratiquée correctement. S'il existe des fuites, on utilise un collecteur fixé à la verge par auto-adhésifs chez l'homme, des couches chez la femme. Dans certains cas, une sonde à demeure est nécessaire (fixée sur la cuisse chez la femme, et chez l'homme de telle sorte que la verge soit relevée vers le haut).
  • La rééducation intestinale cherche à rétablir le réflexe d'exonération fécale (défécation) à l'aide d'une stimulation appropriée. Lorsque le réflexe est aboli, on aura recours à l'évacuation digitale. Une alimentation riche en fibres et équilibrée, des boissons abondantes, favorisent le transit intestinal, ainsi que la pratique du massage abdominal 15 minutes avant la selle.
  • La prévention des escarres suppose l'apprentissage par l'intéressé lui même des gestes de surveillance de prévention des escarres. Il est indispensable d'avoir une hygiène cutanée irréprochable et de changer de vêtements et de garnitures en cas de fuites intempestives. En cas de survenue d'une rougeur, la règle absolue est de supprimer tout appui à cet endroit jusqu'à sa disparition ou sa nette atténuation. Dans tous les cas il est essentiel de chercher la cause de survenue pour appliquer une stratégie de prévention efficace. Les endroits chauds (radiateurs, canalisations d'eau chaude ou de chauffage central) seront tenus à distance des zones insensibles notamment des jambes et des pieds sous peine de brûlures. Attention aux cendres de cigarettes et à la tasse de thé que l'on pose sur ses genoux même avec un plateau !
  • La préparation du retour au domicile est commencée dès que le pronostic est connu et annoncé, aussi bien à la famille qu'à l'intéressé lui-même.

Figure 7

Figure 7
La prévention des escarres passe par une bonne installation en fauteuil.
  1. Mauvaise installation en fauteuil; genoux trop hauts, risque ischiatique.
  2. Appui dangereux sur un seul ischion par bassin oblique.
  3. Répartition correcte des appuis.

Règles élémentaires de prévention de la stase intestinale (prévenir la stase, c'est aussi prévenir l'incontinence)

  • Alimentation adaptée, boisson abondante.
  • Stimulation et mobilisation de l'intestin (changements de position; activité: manipulation du fauteuil roulant, sport en fauteuil roulant, verticalisation; massage et percussion du cadre colique).
  • Présentation régulière sur W.-C. ou chaise percée.
  • Déclenchement adapté, le moins agressif possible.

Prévention des escarres chez les para/tétraplégiques

Soulagement et changement des appuis:
  • assis: soulèvement fréquent;
  • couché: changement de position (si impossibilité essayer matelas d'eau ou gonflable).
  • Ne jamais s'asseoir sur un siège dur, mais toujours un coussin (mousse, gel, gonflable...).
  • Surveiller: regarder avec l'aide d'un miroir et palper chaque soir la peau, en particulier les zones fragiles.
  • Hygiène: avoir toujours une peau sèche, propre, en particulier au niveau de la région périnéale.

Vivre avec une paraplégie ou une tétraplégie

  • L'organisation de la vie quotidienne commence par l'aménagement du logement (ou à défaut la recherche ou la construction d'un logement adapté) : entrée, cuisine, salle de bains, toilettes, chambre et séjour devront être accessibles. Les sujets ne pouvant acquérir une totale indépendance auront besoin d'une aide pour les soins ou pour les actes de la vie quotidienne.
  • La prévention des complications, le suivi médical. Les troubles circulatoires (œdèmes, phlébites, embolies) seront évités par le port de bas de contention veineuse, par l'installation en légère position déclive la nuit (pieds surélevés), en évitant les vêtements trop serrés aux genoux et aux hanches. Un suivi médical régulier en milieu spécialisé est nécessaire une fois tous les ans ou tous les deux ans et plus si nécessaire. Pour le suivi général, un médecin traitant au courant de l'histoire clinique est utile pour toute intervention au domicile et pour les affections intercurrentes.
  • Le fauteuil roulant sera choisi avec l'équipe de rééducation et réglé de telle sorte que les pressions soient réparties au maximum (hauteur des cale-pieds notamment), (fig. 7) et que son maniement soit facile et sans danger pour l'utilisateur (risque de bascule en arrière).
  • Les transports. Le mode de transport le plus utilisé est la voiture, soit avec aménagement du poste de conduite pour les paraplégiques (conduite tout à la main), soit aménagement de l'accès permettant de monter avec le fauteuil roulant.
  • Les loisirs, les vacances, le sport




1 commentaire:

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